Interview d’Olivier Bruyeron, président de Coordination SUD

Intervention d’Olivier Bruyeron, président de Coordination SUD au CNDSI, Paris, 2022. Copyright Coordination SUD

Alain Boinet : L’APD a connu une forte progression en France entre 2017 et 2022. Certains l’ont même qualifié de sursaut. A la veille d’un prochain Comité Interministériel pour la Coopération Internationale et le Développement (CICDID) que la première ministre, Elisabeth Borne, devrait réunir le 14 juin, quelle décision attendez-vous pour l’APD et sa mise en œuvre ?

La France est en effet passée à la vitesse supérieure ces dernières années en augmentant de façon continue son aide publique au développement. Cette ambition a trouvé une traduction importante dans la loi d’orientation et de programmation sur le développement solidaire en 2021. Elle comprend notamment la définition d’une trajectoire de financement à horizon 2025. Une première étape de cette trajectoire a d’ailleurs été atteinte en 2022, année durant laquelle la France a alloué 0,56 % de son revenu national brut à l’APD. La seconde étape que le gouvernement doit aujourd’hui poursuivre, telle que prévue par la loi de 2021, est d’allouer 0,7 % du revenu national brut à l’APD en 2025. Cette trajectoire est la condition nécessaire pour mettre en œuvre les objectifs de la politique française de solidarité internationale et faire face aux défis qui se présentent : creusement des inégalités, accroissement de la pauvreté, effets du changement climatique, pertes de biodiversité, crises humanitaires, détérioration du respect des droits humains… Cet effort pour atteindre le 0,7 n’est pas seulement utile, il est indispensable !

La loi de 2021 prévoit également une augmentation des financements transitant par les OSC de façon à leur affecter 15 % de l’APD bilatérale de la France, soit la moyenne des pays du CAD de l’OCDE.

Sur ces deux points majeurs, alors que le CPD est resté flou, nous attendons que le CICID en précise la mise en œuvre.

Alain Boinet : Le CICID a été précédé le 5 mai par une réunion du Conseil Présidentiel pour le Développement autour du Président de la République. Vous aviez adressé une lettre au Président de la République auparavant. Quel bilan en faîtes-vous et en quoi ce Conseil et le CICID sont-ils complémentaires et en quoi se distingue t’il ?

 Le Conseil présidentiel du développement (CPD) a permis de rappeler et réaffirmer plusieurs des priorités de la politique française de développement, notamment sur les sujets des jeunesses, du climat, des droits humains, de l’égalité entre les femmes et les hommes, de la santé, de l’éducation, et de l’alimentation. Ce sont par ailleurs 3 000 postes de volontariat et d’expertise par an pour 2027 qui ont été annoncés. Une avancée positive pour la solidarité internationale, ouvrant de nouvelles opportunités pour les jeunesses installées en France.

Néanmoins, le contenu de ce CPD apparait décevant. Car même si certains sujets clefs sont mis en avant comme je viens de le mentionner (à l’exception surprenante et problématique des enjeux d’eau, d’hygiène et assainissement), il faut souligner l’absence d’orientations claires en matière de trajectoire de l’APD. La France va-t-elle tenir son engagement de mobiliser 0,7% de son RNB pour l’APD ? Quand ? Rien n’est précisé.

Autre absence de taille : la réaffirmation de la place, du rôle des OSC et de l’évolution des moyens pour soutenir leurs actions !

Par ailleurs, toujours en réaction au contenu du CPD, je rappelle notre opposition ferme à toute conditionnalité de l’APD aux questions migratoires relevant de la politique intérieure française.

Le CICID doit donc permettre d’apporter des précisions sur ces points.

Il n’est pas le moment pour réouvrir des débats clos et tranchés en 2021 par le Parlement. Son rôle est de réunir les différents ministères concernés par la politique de développement solidaire afin de les engager activement dans la mise en œuvre des engagements de la loi et dans l’atteinte des objectifs nationaux, européens et internationaux de la France à cet égard.

Défense et promotion des OSC. Copyright Coordination SUD

Alain Boinet : Coordination Sud demande qu’au moins 15% de l’APD bilatérale de la France transite par les OSC à partir de 2025. Quelle est la situation actuelle, comment envisagez-vous la mise en œuvre d’une telle mesure et quelle serait sa valeur ajoutée ?

Les derniers chiffres disponibles du MEAE font état d’une APD bilatérale transitant par les OSC se situant à 7,25% ce qui demeure faible au regard de la moyenne des pays de CAD de l’OCDE qui se situe elle aux environs de 15%. Pour évoluer vers cet objectif, Coordination SUD a défini une trajectoire des financements publics français à destination des OSC. Cette trajectoire fixe un objectif de 1,850 milliard d’euros en 2025 et 2 milliards en 2027. Ces chiffres peuvent paraitre très ambitieux cependant il ne représente qu’une partie des ressources nécessaires pour répondre aux besoins des populations vulnérables et aux nombreuses crises humanitaires et environnementales qui se démultiplient aujourd’hui. Les Nations Unies estiment en effet que les besoins financiers pour répondre aux ODD représenteront en moyenne sur la période 2019 -2030, 874 milliards de dollars par an dans les pays en développement à faible revenu. Les OSC sont des actrices majeures dans la participation à l’atteinte des ODD, un meilleur financement de leurs actions ne fera que renforcer leur impact et participer à la construction de sociétés mieux organisées et plus résilientes aux crises.

Alain Boinet : L’aide humanitaire internationale est confrontée depuis des années à un grave problème de financement. Entre 2018 et 2021 les financements ont oscillé entre 30 et 31,4 milliards de dollars (USD) par an pour un besoin estimé par les Nations-Unies à 40 milliards d’USD en 2021. Or, entre 2013 et 2023, le nombre de réfugiés et déplacés est passé de 50 millions de personnes à 103 millions cette année. En 2023, le nombre de personnes ayant besoin d’une aide humanitaire est de 339 millions contre 274 millions début 2022. Les besoins sont estimés cette année à 51,4 milliards de USD par UNOCHA et malgré une augmentation probable, nous manquerons encore de financement et l’humanitaire devra réduire les secours essentiels à des populations en danger. En quoi l’augmentation de l’APD et de la part mise en œuvre par les organisations humanitaires pourraient contribuer à résoudre ce manque, en France bien sûr, mais également au niveau de l’Union Européenne et plus largement ?

Les financements humanitaires de la France via le CDCS et l’aide alimentaire programmée ont plus que triplé entre 2017 et 2022 (55,6m€ en 2017 et 187,5m€ en 2022), ce qui est un progrès notoire que nous devons saluer, même si ce dernier montant demeure trop faible notamment du fait de l’augmentation très forte des besoins comme vous l’indiquez.

Au global, les contributions humanitaires de la France restent largement en dessous de la moyenne de l’OCDE, en représentant 3% de son APD totale, là où la moyenne des pays de l’OCDE est à 10%.

La France doit donc poursuivre ses efforts de financements de l’action humanitaire. Cela lui permettra également de valablement s’inscrire dans le discours visant à élargir la base des donateurs et donatrices internationales, revendiqué notamment sur la scène européenne.

Les financements humanitaires de l’APD française sont marqués par une part importante transitant par les OSC.En effet, au-delà des financements destinés aux agences onusiennes, environ 70% des financements du fond d’urgence humanitaire transitent par les ONG. En continuant sur cette trajectoire, l’augmentation de l’APD française devrait donc profiter à l’action humanitaire transitant par les OSC, ce qui est pour Coordination SUD un gage de qualité et d’efficacité en ce que les organisations mènent leurs actions selon les besoins exprimés et les principes humanitaires, notamment de neutralité et d’indépendance.

Atelier de sensibilisation parlementaire aux enjeux de l’aide publique au développement, organisé par Coordination SUD à l’Assemblée nationale, Paris, septembre 2022. Copyright Coordination SUD

Alain Boinet : Le CICID sera précédé par une réunion préparatoire du CNDSI (Conseil National pour le Développement et la Solidarité Internationale). Quel est le rôle de cet organisme et qu’en attendez-vous en vue du CICID ?

Le CNDSI est une instance de dialogue qui réunit différents acteurs et actrices de la société (acteurs et actrices économiques lucratives, syndicats, parlementaires, personnalités étrangères, fondations) y compris les associations, dont Coordination SUD préside le groupe. Ce conseil permet d’entretenir un dialogue régulier avec le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères sur la politique de développement solidaire, bien qu’il ne soit pas décisionnel. L’objectif de cette réunion préparatoire, laquelle s’est tenue le 25 mai dernier, était, pour la Secrétaire d’État, de présenter les principales conclusions de la récente réunion du Conseil présidentiel du développement et d’entendre les membres du CNDSI sur leurs réactions et propositions en vue du CICID. À cette occasion, Coordination SUD a rappelé les recommandations qui ont été développées par les 183 membres du collectif et autres associations membres du CNDSI fin 2022, en proposant à la Secrétaire d’État des propositions concrètes pour le CICID. Nous attendons de la Secrétaire d’État qu’elle porte ces recommandations auprès de la Première Ministre dans le cadre des discussions du CICID.

Alain Boinet : Vous demandez la création d’un ministère ou d’un comité interministériel « dédié à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 ». En quoi une telle structure serait-elle plus efficace ?

Tout d’abord, il convient de préciser que Coordination SUD a ajusté cette proposition. Dans une note publiée récemment, qui revient sur l’impact de la France sur les ODD dans le monde, Coordination SUD recommande plutôt de « Créer un ministère dédié à la coordination et à la mise en œuvre de l’Agenda 2030 ou un organe dédié aux ODD, rattaché directement à Matignon ou à l’Élysée, disposant de moyens suffisants et d’un poids politique lui permettant de peser dans les arbitrages interministériels ». Ce faisant, Coordination SUD met l’accent sur l’importance des moyens et sur le poids politique.

En effet, au-delà de la structure en tant que telle ou de sa position, le réel besoin réside dans le fait de disposer d’un organe qui soit capable d’influencer les négociations interministérielles en faveur d’une meilleure prise en compte de l’Agenda 2030 dans toutes les politiques publiques, et qui dispose de moyens suffisants pour effectuer des analyses en utilisant le prisme des ODD ainsi que pour sensibiliser et former l’ensemble des ministères sur ces enjeux.

Ces recommandations et constats proviennent notamment de travaux de l’OCDE, qui a adopté en 2019 une nouvelle version de ses recommandations en ce sens pour travailler à la cohérence des politiques au service du développement durable (CPDD). Le document, adopté par les États membres, met en avant le concept de la CPDD, indispensable pour s’assurer que l’ensemble des politiques publiques prenne en compte l’Agenda 2030. L’OCDE propose notamment d’« utiliser des dispositifs de coordination à haut niveau […] du centre de gouvernement ou d’un ministère sectoriel chef de file[1] ». La conceptualisation la plus récente de l’UNEP (United Nations Environment Programme) reconnaît également l’importance de la mise en place d’engagements politiques et d’une institutionnalisation ambitieuse[2].

Plus récemment, un rapport du think tank du Parlement européen a illustré à quel point il était compliqué pour un organe ne disposant pas des moyens et du pouvoir suffisant, la Direction générale des partenariats internationaux de la Commission européenne dans ce cas précis, de vérifier que les projets législatifs prennent en compte les impacts sur l’Agenda 2030 domestiquement et dans le monde[3].

Ce type de recommandation a été mis en œuvre dans certains pays comme l’Espagne, où un ministère des Droits sociaux et de l’Agenda 2030 a été créé en 2020. Résultat : l’Espagne rattrape peu à peu la France en termes d’impact domestique sur les ODD, et la devance largement sur son impact positif sur l’Agenda 2030 dans le reste du monde[4].

Alain Boinet : Comment souhaitez-vous conclure ?

Pour résumer notre propos en une phrase, Coordination SUD attend du gouvernement qu’il mette en œuvre la loi du 4 août 2021 pour le développement solidaire et la lutte contre les inégalités mondiales. Cette loi récente pose un programme ambitieux et des engagements concernant l’action de la France en faveur de la solidarité internationale. Elle a été initiée par le gouvernement, largement adoptée par le Parlement et soutenue par la société civile. Nous attendons donc un CICID au moins à la hauteur des ambitions adoptées en 2021.

[1] https://www.oecd.org/gov/pcsd/recommendation-on-policy-coherence-for-sustainable-development-fr.pdf

[2] https://drive.google.com/file/d/17yi37fHr4xM9B0buhYFEKriqfUWSpwvy/view

[3]

https://www.europarl.europa.eu/RegData/etudes/STUD/2022/702571/EXPO_STU(2022)702571_EN.pdf

 

[4] https://www.coordinationsud.org/document-ressource/note-danalyse-odd-espagne-france/

TRIBUNE. Guerre et philanthropie par Francis Charhon

Guerre et philanthropie. Voici bien deux mots si opposés dans notre esprit et pourtant…

Destruction dans le quartier de Kiev, Photo par Aris Messinis / AFP

C’est un choc immense que de revivre pour les générations adultes ou séniors les sombres heures de l’Europe qui paraissaient rangées au rang des mauvais souvenirs et que nos jeunes ne connaissent plus qu’en livres ou en film. Un dictateur solitaire décide d’envahir son voisin pour supprimer tout ce qui en a fait un pays avec son histoire, sa culture, de l’anéantir sous les bombes, les tirs d’obus les plus divers dont semble-t-il certains à sous-munitions.  Cette méthode barbare n’est pas nouvelle pour ceux, comme les ONG ou les journalistes, qui ont eu à travailler sur les terrains d’interventions d’autres régions du globe. Le droit humanitaire est bafoué avec un cynisme qui passe par la création de faux couloirs humanitaires qui seront bombardés ou minés. En Tchétchénie, en Syrie, des villes entières furent ainsi rasées par l’armée russe, les populations civiles prises pour cibles ; les centres de santé, les écoles bombardés. Cette inhumanité choque le monde entier. Mais comment s’opposer à un projet si fou sinon entrer en guerre et déclencher un conflit majeur ? Personne ne le souhaite. Certes, l’armée ukrainienne tente de résister face à un rouleau compresseur qui avance inexorablement en écrasant tout sur son passage. On peut souhaiter, malheureusement sans trop d’espoir, que les sanctions feront réfléchir le président Poutine et que le coût de cette guerre deviendra trop lourd.

Honorer la résistance Ukrainienne et la soutenir n’empêcheront pas les souffrances abominables d’un peuple, les milliers de morts et de blessés, l’exil de dizaine de millions d’hommes et surtout de femmes avec leurs enfants, et in fine l’occupation de ce pays qui sera rasé. Déjà, des régions frontalières comme la Crimée, l’Ossétie, le Donbass ont déjà été occupées ; le rêve de la grande Russie du temps de l’URSS amènera-t-il à d‘autres interventions en Moldavie en Géorgie ? Qui s’y opposera ?

En attendant il faut faire face aux effets de la guerre et la philanthropie y a son rôle.

Rappelons que la philanthropie est un écosystème constitué d’acteurs (associations et fondations), de bénévoles et de donateurs ; ils se sont tous mis en mouvement. La réaction mondiale est à la hauteur du choc face à la violence des images et des témoignages. Des collectes immenses affluent provenant de particuliers et d’entreprises, des volontaires se pressent pour aider, pour soulager la population ukrainienne directement dans leurs pays ou dans les pays voisins. Si la Pologne et la Hongrie peuvent momentanément faire face, la Moldavie et la Slovénie sont des petits pays qui risquent la déstabilisation due à l’afflux de réfugiés. IIs ont besoin de soutiens importants et urgents de la communauté internationale. Toutes les organisations humanitaires se sont mobilisées et mises en ordre d’intervention pour répondre aux besoins des blessés, des réfugiés, pour apporter soins médicaux, aide alimentaire, abris, et soutenir les associations locales qui ont été les premières à faire face. Certaines ONG étaient déjà sur place, d’autres ouvrent des missions en Ukraine et dans les pays limitrophes. Les fondations se sont aussi mobilisées pour apporter leur soutien, non seulement en France, mais aussi au niveau européen grâce à une coordination réalisée à Bruxelles par leur représentation « Philae ». La Croix-Rouge internationale, le Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) et autres agences de l’ONU sont aussi en mouvement.

Dans le même temps, des ONG comme Amnesty international documentent par des témoignages, des photos et des vidéos les crimes de guerre pour pouvoir un jour amener les responsables de toutes ces atrocités devant le tribunal pénal international.

En France les opérations sont menées en coordination avec le centre de crise et de soutien du ministère des Affaires étrangères qui apporte aussi un soutien financier. Cette relation est un modèle de la relation État-associations et fondations et pourrait servir d’exemple pour la mise en place d’une stratégie ambitieuse de relation entre l’État et la société civile.

Toute ces capacités de réaction ont pu se développer en partie grâce à la générosité du public. Ces fonds privés ont donné à ces ONG la capacité de se développer. Elles ont acquis des modes d’interventions de plus en plus professionnels par des années de travail sur les terrains les plus divers (guerres, catastrophes naturelles, épidémies, famine…). Parmi les progrès réalisés, il faut noter l’internationalisation des ONG françaises : elles ont ouvert des branches dans de nombreux pays, augmentant ainsi leur capacité d’intervention et l’inclusion de personnels issus des pays dans lesquels elles agissent. D’autres efforts ont porté sur la coordination entre les ONG au niveau national sous l’égide de coordination SUD, mais aussi international par le réseau VOICE, lieux d’échanges et de partage de pratiques pour faire face aux crises à une échelle suffisante. Un forum humanitaire européen se tiendra en mars organisé par la commission européenne, financeur important de l’action humanitaire par sa division Echo . Il doit permettre de faire un état de l’action humanitaire internationale et d’en faciliter l’action. Ironie du sort, il était prévu bien avant l’intervention russe un débat sur le droit humanitaire problématique dans bien des endroits du monde.

L’immense travail réalisé par les ONG françaises n’est qu’un versant de l’action des associations et fondations.  Elles sont maintenant visibles et reconnues comme une évidence dans le paysage international.

En France, ce même secteur non lucratif mène aussi des actions importantes et nécessaires dans tous les domaines qui touchent les besoins de la société : culture, environnement, action sociale… Pourtant, il n’est pas reconnu comme un acteur à part entière.

Ce serait un projet politique fort, pour un prochain gouvernement, que de donner une reconnaissance formelle à ce secteur. Il faudrait que l‘État accepte de reconnaître le secteur non lucratif comme un secteur économique à part entière, comme le sont l’agriculture, l’industrie, les entreprises, l’artisanat…, sans vouloir en permanence réduire ses capacités d’intervention. Il ne s’agit pas d’opposer deux systèmes, mais de prendre acte que ce secteur apporte des réponses adaptées en complémentarité avec les acteurs étatiques. Par son action, aussi bien au niveau national que local, il est un rempart puissant face au délitement du lien social qui mine notre nation et un élément majeur du « vivre ensemble » indispensable à notre démocratie.

Avoir une politique philanthropique ambitieuse et assumée, avec des objectifs clairs permettrait de comprendre le sens des mesures qui sont régulièrement prises. Il deviendrait possible d’anticiper un coût en amont, plutôt que de prendre des mesures fiscales morcelées sans en peser les conséquences pour les récipiendaires et éviter d‘avancer ou reculer au gré des influences politiques. Ceci serait une véritable révolution culturelle qui demandera beaucoup de travail, du renoncement à des prérogatives, un lâcher prise de l’administration. Elle serait facilitée par une prise de position au sommet de l’État. Des assises sous le patronage du Président permettraient notamment de définir collectivement une vision de l’intérêt général, de l’engagement et de la générosité, de revisiter la gouvernance publique du secteur.

Chroniques philanthropiques, par Francis Charhon. https://www.carenews.com/chroniques-philanthropiques-par-francis-charhon/news/tribune-guerre-et-philanthropie