Le système humanitaire est-il efficace ? Décryptage du rapport SOHS 2018

Le rapport de l’ALNAP « The State of the Humanitarian System » 2018, ou SOHS 2018 pour les intimes, porte sur la période 2015-2017. Il s’agit de la 3ème édition d’une étude, quantitative et qualitative, des plus complètes sur l’état actuel du système humanitaire.

ALNAP est un réseau international d’organisations humanitaires, comprenant des agences des Nations Unies, des bailleurs de fonds, des membres du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, des ONG, des universitaires et des consultants qui se consacrent à l’apprentissage et l’amélioration de la réponse aux crises humanitaires.

L’enquête a été réalisée auprès de 1170 praticiens de l’aide dans 116 pays, 28 gouvernements, 5 000 bénéficiaires de l’aide et environ 500 interviews. Chacun de ces entretiens a été enregistré, retranscrit, traduit à partir d’une multitude de langues, puis analysé et codé. Il y a donc eu ici un travail très robuste pour établir des chiffres et des conclusions. Des données émanant  d’autres sources ont également été prises en compte : la FAO, le HCR, l’ACAPS, UNRWA, etc.

Ce rapport apporte une vision chiffrée et statistique de l’action humanitaire internationale entre 2015 et 2017. Défis Humanitaires vous présente ainsi une synthèse de ce rapport, et publie quelques graphiques avec un texte de présentation pour chacun. Le « SOHS 2018 » complet est accessible en cliquant ici.

 

Où en sont les besoins ?

Entre 2015 et 2017, l’évolution des besoins humanitaires a été croissante, atteignant 201,5 millions de personnes en 2017, avec des répartitions très différentes selon les continents. Le cœur des besoins restent cependant sur la bande du Sahara du Sud (RDC, Ethiopie, Nigéria…) et au sein au Moyen Orient. 23% des personnes nécessitant une aide humanitaire vivraient actuellement dans seulement trois pays du Moyen Orient : le Yémen, la Syrie et la Turquie (voir Schéma 2, SOHS 2018). Pour cette raison, la Syrie a d’ailleurs reçu à elle seule près du tiers des financements pour l’année 2017.

 

L’origine des fonds humanitaires :

La majeure partie des fonds dédiés aux actions humanitaires émane de trois bailleurs bilatéraux : les Etats-Unis (USAID), l’Allemagne (GIZ) et le Royaume-Unis (DFID). A eux trois, ils représentent près de 60% des contributions gouvernementales, soit une légère augmentation de 4% par rapport à 2014. La plupart des fonds ont d’abord été distribués à des agences multilatérales (ONU) pour être ensuite redistribués aux ONG de terrain sous forme de subventions.

 

L’aide humanitaire par type de crise en 2017 : 

Depuis 2015, une nouvelle branche de l’aide s’est particulièrement développée. Il s’agit de l’accueil des réfugiés qui représente plus d’un milliard d’euros d’aide humanitaire, souvent dans des pays affectés par des conflits ou des catastrophes naturelles (voir schéma).

 

Le personnel international et national sur le terrain :

L’augmentation des besoins et des financements de l’aide humanitaire a eu pour effet d’accroître également le personnel sur le terrain. En 2017, les ONG humanitaires employaient environ 570 000 personnes, soit 27% de plus qu’en 2014 (rapport SOHS 2015). Il est notable que cette augmentation repose sur le recrutement de travailleurs humanitaires nationaux, alors que le nombre d’expatriés est lui resté stable.

 

Le système humanitaire est-il efficace ?

Durant ces dernières années, les volumes de financements des bailleurs de fonds ont continué à augmenter, et cela malgré les difficultés économiques et politiques rencontrées dans beaucoup de pays donateurs. Les demandes de financements des ONG et opérateurs ont, elles aussi, continué d’augmenter. Elles restent cependant supérieures aux financements octroyés. Les ressources sont encore insuffisantes pour répondre à la totalité des besoins.

La question de l’efficacité a également été posée aux bénéficiaires sous la forme de questions, telles que : « Les activités humanitaires répondent-elles aux besoins les plus importants » ? Sur les 5 000 bénéficiaires qui ont participé à l’enquête du SOHS 2018, 87% ont répondu « oui » (39%) ou « partiellement » (48%). De même sur les praticiens interrogés, 52% ont répondu que l’atteinte des objectifs des programmes était bonne ou excellente, soit une augmentation de 10% par rapport à l’année précédente.

(Ce graphique a été réalisé par nos soins à partir des données du SOHS 2018, chapitre « l’efficacité du système »).

 

Mali, Liban, Kenya, Yémen, Bangladesh : des études de cas à l’image des défis humanitaires contemporains.

Les chercheurs d’ALNAP ont également souhaité apporter un pan qualitatif à ce SOHS 2018 en s’associant au groupe URD. Le think tank a réalisé cinq études de cas où la réponse humanitaire est particulièrement complexe et se heurte à des difficultés contextuelles (manque de ressources, bureaucratie, situations politiques et environnementales instables) :

  1. Yémen : Sauver des vies et au-delà.
  2. Mali entre espoir et désespoir
  3. Liban stabilité et stagnation
  4. Kenya Sécheresse dans le nord
  5. Bangladesh : Quel avenir pour les Rohingyas ? 

Les cinq études de cas sont disponibles en ligne sur sohs.alnap.org . Retrouvez également le résumé de ce rapport en français : ici.

Par Sarah Boisson 

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